ÉDITO
Accès aux soins : il faut réformer le système de santé
L’accès aux soins est une des premières préoccupations de nos concitoyens. La pénurie de médecins organisée par des politiques publiques à courte vue depuis 50 ans semble la cause première des difficultés d’accès aux soins. Et pourtant il n’y a jamais eu autant de médecins en France selon l’Atlas démographique du Conseil de l’Ordre des Médecins (237 000 médecins en activité).
Quel est donc le problème pour que plus de 6 millions de français n’aient pas de médecin traitant, dont 500 000 patients en ALD, que les délais d’accès à un spécialiste s’allongent et que l’hôpital et en particulier les services d’urgence dysfonctionnent.
Si l’accès aux soins semble si problématique alors qu’on n’a jamais eu autant de médecins c’est qu’il faut réformer le système de santé.
Depuis 2010 nous avons réalisé un virage ambulatoire nécessaire et 40 000 lits d’hospitalisations ont été supprimés (10% du total) mais depuis 2014 le nombre de praticiens hospitaliers a augmenté de 13% (source CNG) alors que durant la même période le nombre de médecins libéraux diminuait de 5%.
Moins de médecins libéraux assument toujours 80% des consultations, 75% des actes techniques et 60% des interventions alors qu’il y a toujours plus de praticiens hospitaliers avec 10% de lits en moins.
De plus le secteur public au cours de ces quatre dernières années a bénéficié de 40Mds de financement supplémentaire sans que le fonctionnement de nos services d’urgences ne s’améliorent et avec un fonctionnement des hôpitaux qui reste déficitaire.
Il faut réformer le système avec un objectif simple : il faut que les médecins soient au plus près des patients et donc en ville. C’est le médecin traitant qui doit être la porte d’entrée dans le système et après lui le spécialiste de ville.
Pour cela il faut renforcer l’attractivité de la médecine libérale et valoriser l’expertise médicale.
Il faut faciliter le fonctionnement coordonné avec les IPA et les assistants médicaux pour dégager du temps médical et augmenter les files actives des spécialistes (plus de patients différents vus moins souvent).
Pour les spécialistes il faut développer les Equipes de Soins Spécialisées (ESS), chacune s’adaptant aux spécificités du territoire et de la spécialité, qui vont permettre de fluidifier le parcours de soins dans les territoires.
Les collectivités territoriales doivent accompagner la création de pôles de santé libéraux.
Il faut aussi réformer l’hôpital public en rendant du temps médical à nos confrères et en favorisant l’ouverture vers la ville et l’ambulatoire avec peut-être des consultations externes dans le cadre d’un système libéral et favoriser l’activité hospitalière des libéraux pour retrouver une vraie mixité d’exercice.
Nous avons le devoir de réformer le système de santé : celui-ci permettra l’accès aux soins de nos concitoyens si on accepte de faire un choc d’attractivité pour la médecine de proximité et d’améliorer l’efficience hospitalière.
Bien Confraternellement.
Docteur Bruno Perrouty
Président Les Spécialistes CSMF
Maîtrise médicalisée oui, maîtrise comptable non
L’article 15 du PLFSS permets au Directeur Général de l’UNCAM de pratiquer des baisses tarifaires des actes si les objectifs quantitatifs et la trajectoire des accords pluriannuels, dans le cadre de l’imagerie et de la biologie, ne sont pas respectés.
Il est demandé de plus à l’imagerie de réaliser 300 millions d’économies sur les années 2025 à 2027.
Les Spécialistes CSMF sont conscients que la maitrise des comptes publics nécessite des mesures d’économies mais qui doivent passer par une meilleure pertinence des actes et respecter les accords passés entre les biologistes et les radiologues d’une part et l’UNCAM d’autre part.
La confiance est un élément fondamental de la réussite de la convention médicale qui a bien entériné un objectif d’économies dans les dépenses prescrites.
Il faut rappeler que pour les autres spécialités médicales il est bien précisé dans la convention que les revalorisations actées dans ce texte son indépendantes de la réalisation des objectifs fixés.
Toute mesure qui permettrait des baisses tarifaires non négociées nous parait rompre le pacte conventionnel avant même qu’il n’ait pu produire ses effets bénéfiques.
L’acte de consultation à 60€ des spécialistes existe, c’est l’APC. Il faut aller plus loin dans la hiérarchisation.
Les Spécialistes CSMF avec la CSMF ont porté durant les négociations une hiérarchisation des actes. Avec l’acte d’expertise médicale qui sera à 60€ à partir du 22 décembre 2024 nous avons effectué une partie du chemin.
Il faut rappeler à certains que cette consultation à 60€ existe bien dans la convention et qu’il n’est pas nécessaire de l’inventer. En revanche nous devons comme cela est prévu en définir les contours.
Cet acte à 60€ est l’acte d’avis ponctuel de consultant (APC) qui est bien défini comme un acte d’expertise médicale et non pas une consultation « rapide ». Il s’inscrit dans le cadre du parcours de soins qui doit tenir compte des réalités du moment.
L’expertise médicale doit être accessible à tous les patients, avec ou sans médecin traitant (le spécialiste n’est pas responsable de l’absence de médecin traitant et ne peut refuser son expertise) du moment que d’une part le patient n’est pas suivi régulièrement par le spécialiste, c’est-à-dire qu’il n’a pas été vu dans les 4 mois précédents et qu’il n’est pas revu, sauf nécessité d’acte pour compléter l’avis, dans les 4 mois suivant et que d’autre part il y a un courrier au médecin traitant ou à un médecin généraliste, voire au patient en cas de carence, courrier qui participe au parcours de soins.
Avec ces conditions nous respectons la qualité, la simplicité et la pertinence de cet acte comme cela est prévu par la convention.
Il nous faut maintenant aller plus loin et reconnaître qu’il existe une expertise médicale très complexe. Ce sont des consultations plus longues, complexes par leur contenu (histoire clinique compliquée, analyse de bilans ou de comptes-rendus, évaluation cognitive et psychique, examen clinique exhaustif, synthèse et diagnostic avec un protocole de soins et parfois annonce difficile d’une pathologie).
Cet acte existe et c’est l’APY utilisé par les psychiatres et les neurologues et depuis cette convention par les gériatres. Cet acte doit être revalorisé au niveau qui était le sien depuis des décennies, à savoir G 2,5 soit 75€ et il doit être accessible à l’ensemble des spécialités mais dans des conditions définies.
Les psychiatres doivent pouvoir coter cet acte pour tout nouveau patient et dérouler ensuite les consultations de suivi. Ceci est particulièrement pertinent dans le cadre du plan de santé mentale. Il faut qu’il soit également l’acte de suivi annuel des troubles neuro-développementaux des enfants et des adolescents. Les neurologues et les gériatres, mais aussi les médecins de MPR doivent pouvoir l’utiliser aux mêmes conditions que l’APC. Cet acte doit également être l’acte des consultations très complexes de toutes les spécialités en particulier des spécialités cliniques (rhumatologues, gynécologues médicaux, allergologues, endocrinologues).
L’APY est un acte peu fréquent mais nécessaire à cette hiérarchisation des actes de consultation que les Spécialistes CSMF avec la CSMF défendent pour que l’activité clinique soit reconnue à sa juste valeur. C’est ainsi que l’accès aux soins se fera avec qualité et pertinence dans le cadre d’un parcours de soins reconnus pour tous quel que soit la situation de chaque patient.